Une histoire d’élan

Une histoire d’élan


Laponie suédoise : Rencontre inespérée avec un jeune élan curieux et timide, puis avec un renne blanc tout droit sorti d'un conte de fée viking mais, comme il n'y a pas que la magie en voyage, panne de gaz soudaine en plein froid polaire ! Je vous raconte tout !

"Car lorsqu'un animal indompté, indépendant, pose son regard sur vous et vous accorde une audience, vous êtes bouleversé pour toujours." François Sarano

  • norvège fjords 1ère partie 264

    norvège fjords 1ère partie 264

  • norvège fjords 1ère partie 266

    norvège fjords 1ère partie 266

  • norvège fjords 1ère partie 268

    norvège fjords 1ère partie 268

 30 septembre 2017 - Je paye la randonnée de la veille auprès des dauphins du fjord ; la douleur me cisaille le dos. Alors pendant que Yoann et Callista mettent un peu d'ordre dans le château-ambulant - on ne voudrait pas le voir devenir un bazar-ambulant ! (petit clin d'œil, comprendra qui pourra) - je profite dehors de la chaleur du soleil, les yeux à demi-clos, à demi seulement car j'ai la responsabilité des chiens-loups. Le lac impassible réfléchit parfaitement les montagnes tandis qu'à l'ombre, les feuilles se parent de dentelles de givre ; l'hiver se rapproche. La route passe non loin et je dois veiller à ce que les chiens ne la traversent pas ; c'est oublier la vivacité d'esprit d'Alanis : elle découvre dans la "zone autorisée" l'embouchure d'un large tuyau qui s'enfonce sous la terre, pénètre à l'intérieur et se retrouve quelques secondes plus tard de l'autre côté de la chaussée. "Qu'y a-t-il ? Je ne suis pas allée sur la route !" semble dire le regard qu'elle me rend.

  • norvège fjords 1ère partie 284

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  • norvège fjords 1ère partie 289

    norvège fjords 1ère partie 289

  • norvège fjords 1ère partie 297

    norvège fjords 1ère partie 297

  • norvège fjords 1ère partie 303

    norvège fjords 1ère partie 303

Nous longeons la côte de la Norvège, de l'extrême nord vers le sud, et la route est spectaculaire. Les sommets enneigés plongent à la verticale dans la mer. Les silhouettes de dauphins se découpent de-ci de-là dans le bleu profond. Il y a peu de place ici pour les hommes entre l'eau et les parois abruptes, alors ils se pressent de part et d'autre de la petite route qui serpente en équilibre : à notre gauche les habitations, à notre droite les cabanes de pêche et les séchoirs à poissons. Doucement, la glace commence à prendre possession de la surface des fjords ; pourvu que l'hiver nous laisse le temps... Comme nous continuons de descendre, nous commençons à rattraper l'automne ; à nouveau les bouleaux sont d'or. Puis à Skibotn, nous bifurquons vers l'intérieur des terres, la Laponie suédoise et les terres Saamii. Et alors que le jour touche à sa fin, alors que je laisse errer mon regard sur les forêts et les prés, je vois... je vois un élan ! C'est inespéré ! Je m'étais faite à l'idée de croiser sans cesse leurs traces sans jamais les apercevoir ; je m'étais résignée à partager leur espace mais à ce qu'ils demeurassent pour toujours les fantômes des futaies et voilà que... Tandis que la vitesse - toute relative en château-ambulant - nous entraîne, je me retourne vers Yoann : "J'ai vu un élan !". Pouvez-vous imaginer la saveur de cette phrase ? Je me la répète silencieusement en mon for intérieur : "j'ai vu un élan, j'ai vu un élan...". L'élan est le seigneur des terres humides - et il est équipé pour : quatre sabots pour chacun de ses pieds palmés et des naseaux qui peuvent se fermer sous l'eau. Il était encore présent en France jusqu'au Moyen-âge et aujourd'hui on discute parfois de sa réintroduction en raison de son rôle actif dans l'équilibre de ces zones particulièrement fragiles. Du haut de ses 2,30 mètres au garrot, c'est un géant. Pensez, nos paint-horses mesurent entre 1,50 et 1,60 mètres seulement. Mais déjà Yoann a fait demi-tour, nous guettons les clairières, il est là. C'est un jeune. Il y a deux adultes un peu plus loin mais lui se tient tout près de la chaussée. Le grand bébé nous observe, il plonge ses yeux dans les nôtres. Depuis le début de ce tour d'Europe, je collectionne ces regards sauvages (comprenez libres et intègres), comme d'autres femmes les bijoux. Ce sont des trésors, ou plutôt - le mot qui m'est venu dans mon journal - des bénédictions. Notre élan est tout à la fois timide et curieux, inquiet et indécis alors il reste là un long moment à se demander qui nous sommes et ce qu'il convient de faire. Ses jeunes bois perlent, un jour il portera une imposante ramure. Puis avec sagesse, il décide de s'en retourner vers les adultes du trot si particulier des élans : ses longues jambes donnent l'impression qu'il perd l'équilibre à chaque foulée mais bien sûr il n'en est rien. Adieu élan. Et merci. En Norvège, on peut décidément se réveiller chaque matin en se demandant ce que la journée va nous réserver de merveilleux. Une habitude à prendre, et à conserver au-delà des frontières scandinaves.

  • norvège fjords 1ère partie 307

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  • norvège fjords 1ère partie 311

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  • norvège fjords 1ère partie 312

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  • norvège fjords 1ère partie 313

    norvège fjords 1ère partie 313

Le paysage change rapidement tandis que nous nous élevons au-dessus du niveau de la mer, nous avons à nouveau laissé l'automne derrière nous. Nous retrouvons la toundra et les hauts plateaux percés de roche, de lacs, et de cascades et nous passons la frontière suédoise juste au moment où une lune énorme et orangée s'élève au-dessus de l'horizon.

1er octobre 2017 - La douleur de la sciatique me cloue au camping-car, je n'accompagnerai pas la tribu en territoire sami. J'en profite pour trier quelques centaines de photos et me réjouir de la visite régulière des rennes à notre château. Un renne d'une absolue blancheur portant des bois majestueux semble tout droit sorti d'un conte de fée viking. Mais nous sommes en Scandinavie, la Terre où tout est possible et où les rêves deviennent réalité.

  • lofoten 010

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  • lofoten 012

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  • lofoten 014

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  • lofoten 019

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2 octobre 2017 - Le jour le plus morose du voyage. Je suis usée par la souffrance et nous tombons en panne de gaz. Moi qui résout tous les problèmes en préparant du thé, imaginez mon désarroi ! Nous nous sommes faits avoir comme des bleus, - bleus que nous sommes d'ailleurs. Nous pensions naïvement avoir anticipé le problème en ayant acheté un jeu d'embouts internationaux avant le départ mais la réalité, bien plus complexe, nous rattrape. Il faudrait déjà parvenir à trouver des bouteilles, puis que celles-ci aient le format adéquat pour entrer dans le caisson, et enfin les laisser à la prochaine frontière pour récupérer la consigne avant de recommencer toute la procédure au Danemark puis en Allemagne avant d'arriver finalement en France. La seule solution qui se présente : faire remplir nos bouteilles françaises dans une station équipée. Evidemment il n'y en a pas au nord de la Suède et nous devons retourner sur nos pas, en Norvège où à force de recherches, j'ai déniché une station gpl qui distribue également du propane. Nous parcourons sans nous arrêter les deux-cents kilomètres qui nous séparent de la station - au moins nous avons chaud - mais presque arrivés à destination, nous découvrons que la route est barrée. Nous entamons un long contournement et arrivons enfin tout cahotant à la station. Le jeune employé présent ce jour-là ne sait pas remplir les bouteilles.

La soirée est déprimante : la station est isolée et l'employé nous confirme qu'il n'y a pas le moindre restaurant à cinquante kilomètres à la ronde. Même le café du village est fermé, c'est lundi... Nos derniers espoirs d'un repas revigorant ou d'une boisson chaude s'évaporent. Le vent souffle fort et nous ne pouvons pas même allumer un feu pour nous réchauffer. Yoann positive comme toujours : au moins on sera couchés tôt et il n'y aura pas de vaisselle à faire ; sa conclusion est tellement inattendue qu'on éclate tous de rire ! J'admire les garçons qui traversent la situation beaucoup plus joyeusement que nous : ravis de passer la soirée à nettoyer le lieu de bivouac de ses rares déchets puis de manger des sandwichs... et jamais frileux ! Nos enfants sont notre plus grande responsabilité, le plus beau cadeau que nous puissions faire au monde et le changement le plus effectif auquel nous pouvons contribuer. Quand je les vois prendre soin de chaque existence - y compris de celle de l'insecte en difficulté -, et faire preuve d'une profonde empathie pour la vie qui les entoure, je me dis qu'il n'y a pas que l'insecte qui est sauvé.

3 octobre 2017 - A la première heure, nous sommes à la station. Le responsable est présent et ne fait pas de difficultés pour remplir nos bouteilles. Nous aurons un petit-déjeuner digne de ce nom ! Mais découragés à l'idée de revenir une fois de plus sur nos pas pour aller à la découverte de la Laponie suédoise comme prévu, nous improvisons comme toujours et prenons la direction des îles Lofoten et Vesteralen, où - magie ! - nous dénicherons l'un des bivouacs les plus grandioses de notre tour sauvage.

Commentaires

  1. Océane

    avril 27

    Oh vivement la suite!!!! Je rêve de découvrir cet endroit!
    Que d épopées!! Mais j aime la vision positif de yoann! Je pense que j aurai eu la même reflexion😂 j adore!
    Quelle rencontre avec l élan! Le renne est splendide.les meilleurs cadeaux de mère nature à ceux qui les méritent. Mais c est aussi la magie des terres du nord.❤

    • titania

      avril 29

      Oui comme tu dis, la magie des terres du nord... Je me sens comme les elfes de Tolkien, nostalgique à jamais... Eh sinon, oui !, l'humour en voyage, c'est une question de survie 😀

  2. Auriane

    mai 5

    Si il n'y a avait pas de "problèmes" le voyage ne serait pas si intéressant et puis, le retour en Norvège vous a permis de découvrir le magnifique bivouac (au vu de vos mots, "magnifique" est peut être pauvre..). Je pense que c'est dans ces moments là que chaque personnalité se découvre un peu plus, vos enfants et même Yohan le prouvent.
    J'ai hâte de lire la suite.

    • titania

      mai 27

      Oui le voyage met à jour et met au jour, aucun vernis ne tient, on se découvre soi-même et c'est étrange qu'il faille partir si loin pour découvrir ce qu'on a à l'intérieur...

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